" La Saga du Tantra "

        " Sur le chemin du Tantra, avec Osho et ses disciples "

 

Music group pune 1

 

Livre en cours d'écriture par Chetan, afin de témoigner de plus de 40 ans d'exploration du Tantra...

Extrait No 4 : " L'initiation "

Nous étions un groupe silencieux, assis sur une rangée de bancs, juste à côté de Lao Tseu House, cette maison pour moi tout à fait magique où habitait Bhagwan. C’était la première fois que je me trouvais à l’intérieur des grilles de la maison. Il y avait de très grands arbres, dont les branches montaient vraiment haut dans le ciel. La maison elle-même était un bâtiment d'une taille appréciable; il se dégageait de tout ce lieu une paix extraordinaire, presque palpable.

Nous sommes restés assis au moins une heure à attendre, et j’aurais souhaité que cette attente ne finisse jamais, tellement je me sentais dans un état de plénitude et d’immense détente. Il me semblait que tout ce que je voyais, entendais ou sentais était en parfaite harmonie : le chant des oiseaux, très nombreux, qui volaient de branche en branche, les bruits étouffés de la ville, la lueur du jour qui baissait doucement, la présence de tous ces hommes et ces femmes, recueillis et pourtant détendus et joyeux.

Et puis nous fûmes invités à rentrer un à un dans la salle attenante, une sorte d’auditorium à ciel ouvert ; on y accédait en passant par une petite allée où plusieurs gardes, des hommes barbus à l’allure à la fois douce et décidée, veillaient à ce que ce ne soient que les personnes pressenties qui viennent dans ce lieu.

Nous sommes assis les uns à côté des autres ; je suis content d’avoir pris une étoffe en plus car le marbre est froid malgré la chaleur ambiante. La pièce est très simple, c'est une sorte d’amphithéâtre capable d’accueillir environ une centaine de personnes, entouré de verdure et avec au-devant une petite estrade. Dans un coin se trouvent quelques musiciens, qui après un instant de silence, commencent à jouer une musique extrêmement mélodieuse où se mêlent des instruments typiquement indiens comme le sitar, et d’autres plus occidentaux. Cette musique vivante est comme une caresse, elle aussi participe à la magie de l’instant.

Puis la porte s’ouvre et Bhagwan apparaît, habillé tout de blanc ; je ne l’avais encore jamais vu d’aussi près. Il s’avance, les deux mains jointes en Namasté, nous saluant lentement de ce geste accompagné par un sourire extrêmement doux, où perce aussi une pointe d’humour. Une fois arrivé sur le devant de l’estrade, il continue à nous saluer, en regardant avec beaucoup de soin et d’attention toute la salle, dirigeant son regard d’un bout à l’autre de l’auditorium. Puis il s’assoit sur un fauteuil qui est posé là.

Une à une, toutes les personnes qui vont prendre Sannyas ce soir-là sont appelées, et nous venons nous asseoir au premier rang à une petite distance de Bhagwan. Il nous regarde soigneusement à tour de rôle, puis écrit quelques mots sur une feuille de papier. Cela dure plusieurs minutes dans un silence total. Une femme est près de lui et l’aide dans ce travail, lui tendant les feuilles une à une ; puis elle lit nos noms, et l’un après l’autre nous venons nous asseoir à environ un mètre de Bhagwan.

A chacun, il commence par donner le Mala, le collier aux 108 perles de bois ; la personne s’incline légèrement et il lui passe le Mala autour du cou, puis avec le pouce il frotte entre ses deux sourcils, au niveau de ce qu’on appelle le troisième œil. Sous ce contact, certaines personnes semblent tomber en extase ; d’autres restent simplement immobiles. Ensuite il tend une feuille où il a marqué le nom d'initiation. Puis il prononce ce nom, et avec ce qui me semble être beaucoup de patience et de gentillesse, il en explique le sens, s’assurant que la personne peut le répéter avec la prononciation correcte.

Il parle ensuite pendant plusieurs minutes à partir du sens de ce nom, en faisant des commentaires qui semblent à chaque fois toucher énormément la personne à laquelle il s’adresse. Plusieurs d’entre elles se succèdent ainsi, et je sens une grande émotion monter en moi et dans toute la salle. C’est à la fois très simple et extrêmement touchant.

Puis mon nom fut appelé, « Joël ». Depuis le moment où j’avais demandé à prendre Sannyas, je m’étais souvent posé la question : « Quel sera mon nouveau nom ? » Je savais qu’il comprendrait mon prénom, Joël, que j'avais voulu conserver, et je me demandais quelle serait la première partie du nom d’initiation,  qui en comportait généralement deux. Beaucoup de personnes à l’Ashram portaient en première partie le mot « Anand », qui veut dire extase, ou bien « Prem » qui signifie amour, ou « Dhyan » qui veut dire méditation, parmi les plus connus.

Je m’étais plusieurs fois demandé si je m’appellerais Prem Joël, Anand Joël ou Dyan Joël… et je fus extrêmement surpris lorsque Bhagwan, se penchant vers moi, me dit : « Your name will be Swami Samarpan Joël ». Je n’avais jamais entendu ce mot « Samarpan ». Il me dit : « Samarpan means surrender and Joël means : life is of good will “. Je savais maintenant assez d’anglais pour comprendre le sens de ces quelques mots.

« Surrender » veut dire abandon ou soumission, mais cela a dans le contexte de l’Inde une résonance très différente de celle que ces expressions ont en général en occident. Il n’y a aucun sens péjoratif, au contraire : l’abandon à l’existence est souvent considéré comme l’ultime qualité religieuse. En revanche, j’étais surpris de recevoir un sens pour mon nom Joël : « Life is of good will » (la vie est de bonne volonté).

Juste avant cela, Bhagwan s’était penché vers moi afin de passer le Mala autour de mon cou ; je m’étais à peine incliné vers l’avant, gardant les yeux grands ouverts, totalement stupéfait de percevoir cet homme de si près. Une photo a été prise à ce moment-là, que j’ai pu me procurer quelques jours plus tard : je m'y suis vu les yeux presque écarquillés, comme si je voulais capter au maximum tout ce que cet homme émanait. Un grand amour semblait m’entourer et me baigner, comme une immense caresse à son contact.

Il m’avait massé doucement au niveau du troisième œil, mais je n’avais pas senti grand-chose, pas de visions ni de lumière ; je savais que d’autres personnes vivaient des ravissements ou des expériences énergétiques très fortes. Rien de cela ne se produisit ; peu à peu je compris que chacun recevait une transmission d’énergie équivalente à ce qu’il était capable de recevoir ; cela indiquait simplement mon faible degré d’ouverture à ce moment-là.

Puis Bhagwan me parla pendant plusieurs minutes ; je ne compris pas tout, mais j’étais charmé, émerveillé qu’il s’adresse à moi ! Je ressentis cela comme une merveilleuse bénédiction. Au fil des années, cette initiation reçue directement du Maitre m’est apparue comme une des très grandes chances de ma vie, d’autant plus que quelques mois plus tard cela s’arrêta : Bhagwan, à cause du nombre croissant de demandes, arrêta de donner lui-même les initiations et se fit représenter par Teertha, un de ses proches disciples. Je fus donc parmi les derniers à vivre ce que je considère comme un immense privilège…